LA BIBLIOTHÈQUE RUSSE ET SLAVE

 LITTÉRATURE RUSSE

 

 

Wsevolod de Vogt

(Фохт Всеволод Борисович)

1895 — 1941

 

 

 

 

 

 

QUELQUES ASPECTS DU ROMAN RUSSE
DEPUIS 1918

 

 

(Septième réunion du Studio franco-russe)

 

 

 

 

 

1930

 

 

 

 

 

 

Cahiers de la Quinzaine. « Le Roman depuis 1918. Textes suivis de débats », cahier 8, série 20, 5 mai 1930.

Édité par Leonid Livak et Gervaise Tassis, Le Studio franco-russe, Toronto, 2005.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Pour demeurer fidèle à la méthode que presque involontairement nous avons adoptée au Studio franco-russe depuis le débat sur les influences, je devrais traiter aujourd’hui le même sujet que M. Crémieux. Or je me propose, pour certaines raisons, de parler de tout autre chose. Je pense d’ailleurs que le débat à venir y gagnera. Il ne manque pas, dans cette salle, d’écrivains plus qualifiés que moi pour discuter du roman français du point de vue soit littéraire, soit idéologique. Je préfère prendre un biais pour répondre à M. Crémieux et faire ressortir ce qui nous sépare. Je crois encore que le vrai sujet de la discussion à laquelle nos deux exposés doivent donner lieu, vous le trouverez précisément dans l’opposition non pas de nos jugements, mais de nos sujets, dans les différences d’abord, enfin dans les divergences difficilement définissables qui résultent du caractère même de la nature de l’intérêt que nous portons au problème posé par le roman contemporain. C’est ainsi que, désirant vous entraîner d’une conversation purement littéraire, « professionnelle » comme dirait M. Pozner, vers un débat plus général, j’essaie de justifier à vos yeux une tentative de vous présenter quelques aspects du roman russe. Du roman de l’émigration seulement, puisque nous devons consacrer une soirée entière à l’étude contradictoire de la littérature dite soviétique.

« Quelques aspects », cela veut dire aussi que je n’ai pas l’intention de dérouler un panorama aussi vaste et, me semble-t-il, complet que M. Crémieux. Je ne viens pas faire œuvre d’informateur mais, puisque le principe en est admis entre nous, apporter un avis subjectif, un sentiment personnel. Enfin, comme M. Kirill Zaïtsev le disait très justement l’autre soir, il est difficile de parler de ce que l’on n’aime pas ; et j’accepte avec égoïsme cette formule, d’autant plus volontiers que plusieurs de mes compatriotes s’empresseront sans doute, n’étant pas de mon avis, de citer d’autres œuvres que celles qui appellent mon attention. Mais venons à notre sujet.

Une constatation d’abord s’impose, d’ordre général. Alors qu’à la suite de la guerre il est possible, en Europe, de parler de « reconstruction », il semble que ce mot ne doive pas pouvoir être appliqué à ce qui se passe en Russie. Ce pays est, en effet, un monde nouveau, un monde où la vie physique, matérielle, est devenue extrêmement difficile et précaire tandis que la vie profonde, morale et spirituelle, y est interdite et méprisée — à moins qu’elle ne se déroule et ne se manifeste selon un évangile nouveau, des commandements officiels, et ne s’exprime en un langage de convention. C’est la liberté de la vie intérieure qu’on cherche, en Russie, à faire oublier des esclaves de la religion matérialiste. Or, la liberté c’est la base de la religion chrétienne, et c’est l’amour, dans la liberté, de Dieu et de la création que prêche et défend l’orthodoxie. Le peuple russe tout entier est jaloux de sa liberté intérieure, bien plus encore que de la liberté individuelle d’agir et de vivre chacun selon ses goûts. C’est ce qui le rendit libertaire, aucune catégorie de discipline intérieure ne pouvant par une sorte de principe, lui être imposée, mais pouvant seulement être volontairement admise par lui. Une continuité évidente de culture et d’inspiration qu’on observe toujours en Europe, en dépit de toutes les perturbations qu’elle vient de vivre, doit être opposée à une rupture définitive avec les traditions culturelles, à quoi nous assistons en Russie, en même temps qu’à une scission qui divise le pays entre les partisans d’une révolte sociale et les adeptes de la Révolution spirituelle. Je me borne à enregistrer le fait, important pour nous, car c’est par lui que s’explique, en partie, chez les écrivains russes venus en France, ce pays d’ordre, de discipline adoptée, un sentiment général et, je le crois, commun à tous.

Après avoir subi non seulement toutes les épreuves par « les fers et les fouets » qui caractérisent, depuis deux siècles, l’histoire littéraire russe mais encore une ultime épreuve ou une tentation par l’esprit, ces écrivains, derniers dépositaires d’une liberté nationale en même temps que derniers fidèles libres d’une religion du cœur et de l’esprit, se sentent être la conscience incarnée d’une grande partie tout au moins de leur peuple et savent ce que cette situation, l’expérience qu’ils ont vécue, leur imposent d’obligations et, même, leur vaut de jalousie. Mais ils se trouvent en Europe et dans ce pays où tout les appelait comme dans un immense désert de sables mouvants, ou bien comme dans une sorte d’espace métaphysique ; séparés des leurs par l’exil, ils le sont comme par des cloisons étanches mais invisibles de ceux aussi qui les entourent et qui n’ont pas fait, eux, la même expérience. Comment planter en un sol étranger, inaccessible ? Comment, de loin, réconcilier leur pays avec son passé, et en préparer l’avenir, ce qui serait précisément faire œuvre de reconstruction ? On est là, comme si, on vivait « dans l’air » ou, pour m’emparer d’un mot heureux de Mme Gorodetskaïa, dans un terrible « courant d’air », dans un lieu où le vent pénètre de tous les côtés, par toutes les fentes, et nous pousse et nous fige à la fois.

Dans ce « climat métaphysique » naissent plusieurs autres sentiments et idées. L’inquiétude d’abord, une angoisse pour toute la civilisation occidentale et la culture chrétienne. Les déceptions et l’amertume des vainqueurs sont plus poignants, plus effroyables aussi que le dépit et la rage impuissante des vaincus. On se résigne difficilement à voir comment l’Occident accepte son aveuglement, d’origine faussement sentimentale et contre lequel, malgré tout, la raison, l’élémentaire logique se révoltent, devant ce qui de toutes parts le menace : le renouvellement d’une tuerie et les conquêtes, dégradantes et rapides, du matérialisme dont la méthodicité occidentale est doublée d’un fanatisme asiatique. Que de compromis acceptés, et non pas dans le seul domaine de la politique, mais bien dans tous les domaines. Mérejkovski, dont personnellement, et du point de vue artistique, je n’aime pas le tour d’esprit et le ton apocalyptique des prophéties, a malgré tout raison de prêcher l’universalisme qui lui est cher, bien qu’il sache qu’il clame dans le désert. Son inquiétude très complexe est à la fois celle d’un chrétien, c’est-à-dire d’un homme libre, et celle d’un penseur qui a hérité de toute la civilisation occidentale, qui en est fier encore devant un terrible danger d’asservissement et d’avilissement s’étendant sur le monde entier. Encore que la chaleur, la vraie foi qu’est le simple amour humain ne se laisse qu’insuffisamment sentir dans son œuvre, il a souci d’un ordre spirituel, de l’avenir de l’humanité, et reste légitimement satisfait de la clarté pénétrante — je suis tenté de dire : occidentale — de son raisonnement. Se flattant d’être conscient de l’heure que nous vivons, il ne craint pas de l’exprimer souvent avec excès, devant l’intransigeance émoussée de ses contemporains. Il voit naturellement le chemin du salut — si salut il peut y avoir — dans un christianisme universel auquel il rattache avec un art consommé bien que sans nous convaincre tout mythe religieux, et dont il cherche le pressentiment sinon l’origine dans la nuit païenne du monde. Dépourvu de l’humanité d’un Tolstoï et des intuitions mystiques d’un Dostoïevski, ces écrivains dont il aimerait tant représenter la synthèse, Mérejkovski, esprit essentiellement critique, déroule une série d’études historiques plutôt que de romans, et il semble que ce visionnaire, réel ou prétendu, ne doive connaître de paix tant qu’il n’aura pas poussé son étude de toute mystique jusqu’à l’avoir entièrement rationalisée par ses découvertes ou par ses paradoxes.

Il convient d’aborder tout autrement l’œuvre de Bounine, ce maître incontesté des prosateurs russes contemporains. Il est tout entier dans la nature et dans l’art, dont sa philosophie ne se dégage que lentement et insensiblement. C’est devant l’amour et la mort que l’homme l’intéresse le plus, avec sa foi simple ou avec sa complexité ou bien encore avec sa puissance — il serait plus juste de dire : avec la condamnation à « la tombe d’oubli » qu’il porte en lui. C’est parce que devant l’amour comme dans la mort l’homme se dépouille le plus que ces deux instants attirent, en Bounine, le créateur avide, anxieux et impuissant de pénétrer le secret de la vie, d’en définir le sens, d’en découvrir la justification éternelle. Bounine, artiste sensible à la joie immense répandue ici-bas, connaîtrait la sérénité s’il n’y avait pas cette fatalité à laquelle nul ne résiste et que nul n’évite. Dès lors, se demande-t-il toujours, pourquoi naissons-nous, à quoi bon tout le bonheur, toute la puissance et la richesse des dons qui font notre orgueil et la gloire du Seigneur, puisque tout s’écroule et qu’il ne reste en fin de compte que la « mortelle infamie » du corps que la vie a quittée ? « Toutes celles et tous ceux que nous aimons sont notre doux martyre ; fût-il doux et joyeux, c’est un martyr quand même ; combien nous coûte seule cette peur éternelle de la perte de l’objet », dira-t-il de l’amour. Son œuvre entière n’est qu’une tentative constante et désespérée, faite de joie et d’épouvante selon que triomphe l’amour ou la mort, de réconcilier l’homme avec la nature et la nature avec Dieu. Mais cette réconciliation, il faudrait pour lui qu’elle s’opérât sans le secours de la foi, sans le mysticisme d’aucune religion. Ainsi sa foi à lui, sensible et profonde pourtant, ne dépasse pas l’événement de la mort. Non pas qu’il n’atteigne jamais l’intangible : dans la Vie d’Arséniev, ce bilan d’une vie qui touche à son soir, de la Vie, et d’une époque disparue avec laquelle il s’agit également de réconcilier la postérité, il aborde, en prose, pour la première fois dans la littérature russe, ce que seuls les plus grands de nos poètes osèrent exprimer. Mais l’intuition d’un autre monde, de l’au-delà, ne s’identifie pas plus qu’un hymne avec la foi. C’est donc un problème d’humanisme plutôt que celui de la chrétienté que pose l’œuvre de Bounine et que dans le plan artistique et naturaliste elle cherche à résoudre.

Puisque j’ai prononcé le mot d’humanisme, qu’il me soit permis de l’étudier dans l’œuvre déjà vaste et répandue de Mark Aldanov. Avec lui, davantage encore peut-être qu’avec Bounine, semble revivre la tradition du roman-fleuve dont il fut tant parlé ici. Il peint non pas un événement mais une époque, non pas l’individu mais une société, je dirais même un monde, mais un monde moyen au sens où l’entendait M. Vycheslavtsev, parlant de Proust et de la tragédie objective. Non plus que les héros du romancier français, les personnages les plus importants de Mark Aldanov ne touchent jamais à la limite du Bien et du Mal. Ne cherchez pas chez lui une révolte ou un cataclysme. Certes, il sait mesurer l’importance de tout événement, et rarement il l’exagère dans un sens ou un autre, ce qui le différencie de tous les romanciers russes. Il ne le présente pas non plus sub speciæ æternitatis mais le fait apparaître comme une conséquence inéluctable d’un étroit entrelacement de circonstances, de sentiments, vils ou nobles, d’intérêts, égoïstes ou généreux, avec une objectivité qui loin de nuire à la force d’expression séduit encore le lecteur par la surprise qu’elle provoque. Mark Aldanov n’a rien d’un réformateur ni d’un rêveur. Esprit positif ou rendu tel par la force des choses, il sait que le monde va son chemin et que chacun y subit — ce spectacle est d’ailleurs passionnant en lui-même — l’arrêt du Destin — je ne dis pas : de la Providence — arrêt auquel tout homme contribue, concourt dans la mesure de sa biographie et de sa psychologie. Ce serait du rationalisme s’il n’y avait pas une fatigue, un pessimisme que je crois incurable en même temps qu’une émotion et une admiration sincères…

« Un Girondin désabusé » a-t-on dit de lui, et c’est bien le comprendre que de le définir ainsi. Cependant, forcé de reconnaître qu’il a vu loin et juste dans les événements et les hommes que présente sa tétralogie le Penseur et, plus récemment, la Clef, un roman dont l’action se situe à la veille de la révolution russe, je ne puis m’empêcher de m’écrier, en réponse au pessimisme et au scepticisme certes légitimes de Mark Aldanov : « Non, je n’accepte pas pour définitive et complète cette peinture objective. Je connais comme vous les personnages de la Clef, mais à ce réquisitoire terrible contre une partie de la société russe, j’oppose une certitude sentimentale, un espoir inébranlable et que la vie aura justifié, de purification continuelle, d’expiation, de douleur surtout, plus profonde, que vos personnages taisent comme vous, mais que, comme vous, ils éprouvent à l’heure où l’homme est seul. Car sans cette douleur comme sans amour, il serait impossible et bien inutile de vivre ». J’admets volontiers que chacun lit ce qu’il veut dans une œuvre. J’accepte celle de Mark Aldanov comme une négation d’un ordre existant, basé sur la raison et le calcul, comme une condamnation sans appel de la veulerie, du compromis qui « arrange tout » dont elle offre une saisissante peinture. Je l’admets enfin comme une démonstration de la misère d’un monde qui renonce à la vraie vie, à la vie spirituelle. Que les faits aient dépassé le dessein de l’auteur, je suis prêt à en convenir mais cela m’importe peu. En l’occurrence, je lui en sais gré.

Avec Boris Zaïtsev, nous sommes dans une atmosphère toute différente. Lui aussi, il aime l’Occident — c’est un « italianisant » passionné ; lui aussi, il a peint les plus humbles passions humaines et senti l’âcre arrière-goût d’une sensualité plus esthétique qu’animale. Il n’a rien d’un moraliste ni d’un théologien, bien qu’il soit auteur d’une Vie de saint Serge de Radonège et d’un Mont Athos. Tandis que Bounine est séduit dans l’Occident par une chevalerie mâle avec ses cathédrales et ses remparts, tandis que Mark Aldanov ne peut s’empêcher d’y admirer une civilisation, un raffinement dont au fond il souffre avec tous ses personnages, les passions étant ravalées peu à peu au rang d’intérêts opposés qu’à force d’astuce, et le destin aidant, on parvient à concilier, Boris Zaïtsev est sensible, dans le monde latin, à une harmonie intérieure, à une marche légère, comme si elle était ailée, au son d’un luth qui s’étend sur le crépuscule romain. Il y a en lui du Mozart et du Bach. C’est uniquement un artiste, mais un artiste chrétien. La mort elle-même a chez lui une douceur, puisqu’elle est naturelle, puisque le Créateur la tolère et lui confère un pouvoir bienfaisant de délivrance. Orthodoxe et russe, il oppose au monde occidental la victoire de la paix qu’il préfère à celle du combat, et cette paix, il choisira, pour l’exprimer, Raphaël et non pas Michel Ange, si grandiose que soit le Jugement dernier. Certes, il dira avec Mauriac que « le roman tel que nous le concevons aujourd’hui, est une tentative pour aller toujours plus avant dans la connaissance des passions. » Mais au cœur le plus torturé Dieu ne refuse pas la Grâce. Par delà la tombe, un espoir demeure. On peut donc, sans aucune crainte, poursuivre la réalité, peindre le vice, insuffler la vie à des monstres, car en vertu d’un mystère chrétien, que chacun peut éprouver, tout être finit par arriver devant son Créateur. On peut être un romancier chrétien sans dénoncer l’art et sans commettre de péché.

Le dernier roman de Boris Zaïtsev, Anna, qui paraîtra cette année en français, évoque la Russie soviétique et un drame d’amour auquel la tragédie de la révolution sert de fond. Cependant, Anna est malheureuse non pas parce que fille du peuple elle aime un ancien seigneur — ils eussent pu vivre en paix si elle n’était pas jalouse de son passé à lui. La mort lui ravit son amant. Victime d’une sombre vengeance, elle est tuée elle-même par la balle d’un bandit. Seul, un enfant continue à jouer dans le manoir, un enfant qui ne connaît encore que la vie.

D’autres romanciers, appartenant à des générations différentes, devraient encore retenir mon attention. Je m’en voudrais de ne pas nommer Alexeï Rémizov qui exerce une influence énorme sur les jeunes de l’émigration et sur ceux de Moscou. Cette influence n’est pas seulement formelle. Rémizov a peint, lui aussi, l’humiliation et le malheur de « pauvres gens » sous la révolution, et surtout, il a profondément senti l’existence, à côté du nôtre, d’un monde de songes troubles, de sentiments confus, si souvent révélateur d’une vie plus profonde de l’âme. À l’élément du fantastique que contient son œuvre, ses disciples sont naturellement sensibles. C’est encore une évasion d’un monde accablé par la tragédie et la rupture avec un état passif qu’imposent les circonstances.

Une tentative intéressante d’évoquer la vie des intellectuels dans Moscou sous la terreur est faite également par M. Ossorguine. Une rue de Moscou (Sivtsev-Vrajek) parue dans la Revue des Vivants est à la fois une série de documents et une peinture touchante des hommes dans toute leur faiblesse, qu’il s’agisse de soumission ou de fureur, de vils instincts libérés.

À Berlin, Vladimir Sirine crée des fantômes en chair et en os, d’une réalité troublante : un jeune homme qui aime une jeune fille et qui renonce à vivre son amour, lorsqu’il le pourrait enfin ; un adultère, où la femme prépare l’assassinat du mari par l’amant ; mais le jour venu, le mari doit toucher une forte somme, l’assassinat est remis et, peu de temps après, la femme succombe à une méchante grippe ; enfin, dans une troisième œuvre, un enfant prodigieux ; un joueur d’échecs génial, complètement détaché de la vie.

À Paris, une Soirée chez Claire, de Gaïto Gazdanov, fait écho à cette tendance de contemplation passive, où l’influence proustienne, surtout formelle, se fait sentir. C’est adroitement fouillé, intéressant, mais jamais émouvant. Un art individualiste au point de devenir gratuit, éphémère.

Mme N. Gorodetskaïa se montre plus réaliste que Sirine et Gazdanov. On sent chez elle un souci du concret, du stable. L’héroïne de son premier roman, une jeune femme, met tout en œuvre pendant la guerre civile et, plus tard en exil, pour une tentative de reconstruction, par l’attention et le dévouement envers le prochain, envers tout être humain, d’un ordre naturel que les événements ont rompu, mais qui est indispensable à tous.

D’autres écrivains devraient être nommés, d’autres œuvres citées qui recèlent des tentatives généreuses de réconciliation, ou des confessions individualistes, ou des avertissements d’un ordre plus profond. Mais il est grand temps de finir. Disons qu’une œuvre authentique est essentiellement une expression libre de l’âme humaine. Mais, pour mon compte, je crois que demeurent, et nous touchent seules les œuvres où, comme dans certains romans que je viens de citer, il y a plus qu’un avertissement, un document, une confession — où il y a, au nom d’une Vérité spirituelle, un appel.

 

 

 

 

 

 

 

 


 

 

 

 

 

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Texte établi par la Bibliothèque russe et slave ; déposé sur le site de la Bibliothèque le 19 juin 2022.

 

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